Publié le 24 octobre 2010, dans Actualités, Course et glisse, Route du Rhum-la Banque Postale
Histoire d’Homme et de Bateau
Les bassins de St Malo débordent de bateaux de plusieurs catégories, monocoques de 60 pieds de la classe IMOCA, Class40, Multi50, Classe Ultime et catégorie Rhum, qui sont tous dans l’impatience de voir s’ouvrir les écluses qui leur permettront de s’élancer dans cette folle traversée de l’Atlantique pour atteindre le 1er Pointe à Pitre en Guadeloupe.
Ils seront 86 le 31 octobre à s’aligner sur la ligne de départ de cette Route du Rhum qui a été remportée lors de sa première édition par Micke Birch sur son tout petit trimaran jaune avec seulement 98″ devant Michel Malinowski skipper du monocoque Kriter .
On était alors en 1978, et Michel Etevenon venait de créer la plus belle victoire d’une course française qui partait de St Malo en France pour arriver, quelques jours plus tard, toujours en France, dans une de ses iles antillaises, la Guadeloupe.
Le temps de Mike Birch en 78, 23jours 6 heures, 59 minutes, et pour la dernière édition en 2006, 7jours, 17 heures 19 minutes établi par Lionel Lemonchois sur Gitana XI.
Le mythe était né de cet exploit, terme d’une aventure folle à travers un Atlantique qu’il fallait savoir dompter, et avec lui le plus grand rêve de tout navigateur: « participer à la Route du Rhum ».
On est aujourd’hui à la 9ème édition (elle se court tous les 4 ans) et ils sont encore plus nombreux à avoir réussi à s’inscrire et à se qualifier pour enfin réaliser ce « rêve d’enfant ».
Mais rêve ou pas il faut rester pragmatique trouver un bateau et un sponsor.
A chacun sa méthode. Il y a les professionnels qui ont un programme établi de plusieurs courses avec leur partenaire, tels Franck Cammas et Groupama, Michel Desjoyaux et Foncia, ou encore Franc-Yves Escoffier et Crêpes Wouahou, pour ne citer que ceux-la.
Et puis il y a les amateurs qui sont encore à la recherche des derniers euros qui vont leur permettre de boucler leur budget.
Mais quelles sont les motivations d’un marin pour un tel challenge ?
Rencontre avec le skipper de Yslab « La mer révèle nos sens »un des 12 skipper de la classe Multi 50.
Philippe Laperche est propriétaire depuis février 2010 de Crêpes Wahou, le 1er trimaran de Franck-Yves Escoffier .
Au programme plusieurs courses dont la Vendée – San Petersbourg, et le Graal : la Route du Rhum- La Banque Postale.
Pourquoi ?
« Pour rejoindre mes parents qui vivent en ce moment à Deshaies en Guadeloupe », et « c’est pour moi une aventure maritime et humaine » dit-il avec le sourire.
Si la mer il la connait pour avoir navigué en nombre de milles 1 traversée et demie de l’Atlantique, il ne l’a cependant jamais traversée, et il est, nous dit-il, « très excité d’y aller, de tester ses limites, de côtoyer l’extrême, d’assouvir son ego ».
Son Gamin qui a pris le nom de son sponsor Yslab « La mer révèle nos sens », est son lieu de survie, il se sent bien sur ce multi 50, c’est « un trimaran très sûr, très confortable, je peux compter sur lui, il a mené Franc-Yves Escoffier deux fois à la victoire dans la Route du Rhum ». « Je ne lui demande pas de gagner la course, il est un peu vieux maintenant, il a 20 ans, mais d’aller jusqu’au bout »… »Non je ne lui parle pas, mais on est en symbiose, on est bien ensemble ».
Philippe Laperche n’en n’est pas à sa première course en solitaire, il a participé il y a plus de 20ans, (il a 41ans), à 2 solitaires du Figaro, mais cette route du rhum est plus longue.
Pendant ces années de voile il a eu de grands moments de vie sur l’eau et de précieux conseils de ses amis les grands marins Thomas Coville, qui revient pour cette édition dans la classe des Ultimes, sur Sodebo et Laurent Bourgnon, double vainqueur du Rhum en 94 et 98.
Et il y a Franck-Yves Escoffier, lui aussi double vainqueur dans la classe des multi50, et qui a peut-être un des plus beaux trimarans dans cette catégorie.
Dans le bassin les deux bateaux sont côte à côte et il est aisé de voir les évolutions apportées au nouveau bateau de Franck-Yves.
Y-aura-t-il des échanges grâce aux liaisons par téléphone satellite en mer entre les deux marins ? « Je ne sais pas, peut-être si on en a besoin » mais avec la terre il y a le routeur Dominique Conin avec qui régulièrement il partagera les informations météo, mais il sera toujours le seul à prendre l’ultime décision. Et puis pour rompre avec la solitude, il y a toujours sa femme qui est aussi voileuse et qui lui a laissé toute la liberté nécessaire pour la réalisation de son projet, ainsi que ses deux garçons sûrement admiratifs des exploits sportifs du père qui est aussi chirurgien-dentiste .
D’ailleurs pour éviter de payer le retour du bateau par cargo (25 000€) Philippe Laperche reviendra par la mer avec son fils aîné de 13 ans pendant les vacances de février.
A son projet, s’est évidemment associé un sympathique partenaire, le pharmacien breton Marc Hemon qui a, comme Philippe l’amour de la mer et de la voile.
Il y a 10 ans Marc Hemon installait à Quimper Yslab (contraction Ys, ville et roi de légende, et lab pour laboratoire). Il s’agissait là de réunir un réseau de compétences afin de valoriser les actifs marins d’un haut potentiel santé.
La création d’une charte devait apporter plus d’engagements au laboratoire Yslab afin d’offrir au consommateur des produits issus de l’eau de mer (+?) qui soit d’une « innocuité active », et de respecter la biodiversité du milieu marin. Yslab qui propose des produits d’hygiènes pour les organes de nos sens, travaille avec différents laboratoires aux quatre coins du monde.
Cette implication dans la biotechnologie marine n’a pas entravé les multiples activités de ce passionné qui avec amour nous a fait découvrir sa zone de vie, cette agréable commune de Plouher posée au bord de la Rance. Respectueux de la nature il la surveille de près, habite un ancien monastère restauré en jolie maison, et navigue sur son bateau de bonne conception construit de ses mains.
Ces points de vie ont rapproché le skipper et le sponsor – la voile, le respect de la mer , car il est à noter que le trimaran de Philippe est un bateau éco, il a 20ans, navigue toujours est en excellent état, est équipé d’une éolienne, d’un panneau solaire, d’un alternateur, et consommera, avec les regrets du skipper, 50 litres de gasoil pour cette Route du Rhum.
Et en attendant les larmes du grand départ, car nous dit Philippe, « je vais sûrement pleurer; l’émotion due à la foule, la séparation d’avec les terriens ?, je ne sais pas comment l’expliquer « .
Pour l’instant, le trimaran « la mer révèle nos sens » Yslab , fait partie de ces bateaux devant lesquels viennent aussi rêver les milliers de visiteurs qui vont défiler le long des quais de ce village qui fait plus d’un kilomètre, installé au pied des remparts de la cité corsaire.